Renforcer la protection du franchisé : un colloque réussi

le 02 avril 2008

Renforcer l'information préalable, abandonner les clauses de non-concurrence, limiter le droit d'agrément du franchiseur en fin de contrat : telles sont les principales conclusions du colloque « La protection du franchisé au début du 21ème siècle », organisé par le cabinet BSM et le Centre René Demogue, et soutenu par le Cidef et l'association Chiffre et Droit.

Ce colloque, qui s'est déroulé le mardi 1er avril 2008, a connu un franc succès. Une centaine de personnes, avocats, praticiens d'entreprise, conseils en franchise, se sont retrouvées pour écouter des intervenants de qualité : Monique Ben Soussen, Véronique Sélinsky, Jean Bauchard, Henry Moyroussef, Emmanuel Raynaud, Nicolas Dissaux, Didier Ferrier, Romain Loir, Françoise Auque, Martine Béhar-Touchais, Hubert Bensoussan, Stijn Claeys, Horst Becker,

Pour le courant libéral, largement représenté dans ce colloque,  trop de protection tuerait la protection, et protéger le franchisé reviendrait à ... désavantager le candidat, suivant le raisonnement selon lequel la protection du salarié serait le frein principal aux embauches de chômeurs.

Cette argumentation libérale est évidemment bienvenue pour les franchiseurs. Mais contrairement à ce que laisse entendre cette théorie du « laissez-faire, laissez aller », tout ne va pas pour le mieux dans le royaume de la franchise. En particulier en termes d'information préalable et de sortie du contrat.

Le franchiseur doit fournir des chiffres sérieux

La première pierre d'achoppement, c'est le compte prévisionnel. Il est indispensable. Le franchisé en a besoin, le banquier l'exige. On ne peut le construire que sur la base des indications du franchiseur. Et même si la loi Doubin n'exige pas formellement de ce dernier qu'il établisse le prévisionnel du franchisé, la jurisprudence retient sa responsabilité en cas de prévisionnel trop éloigné de la réalité. Alors, ne faudrait-il pas qu'intervienne la loi pour fixer les règles en la matière ?

Sans aller jusqu'à l'obligation pour le franchiseur de fournir prévisionnel et étude de marché « clés en mains » au franchisé, les débats ont ouvert une autre piste, soulevée en particulier par Monique Ben Soussen  : la loi devrait exiger du franchiseur qu'il fournisse les chiffres-clés (chiffre d'affaire et résultat) de tous ses points de vente, franchisés ou succursalistes. Sans ces données, le candidat ne peut pas véritablement « s'engager en connaissance de cause », comme le préconise la loi Doubin.

L'autre grand sujet de réflexion a porté sur les clauses de non-concurrence et de non-affiliation en fin de contrat. Un consensus surprenant commence à se dessiner entre conseils des franchiseurs et défenseurs des intérêts des franchisés pour reconnaître que ces clauses, aujourd'hui, n'ont plus grand sens. Les clauses classiques de non-concurrence (interdiction d'exercer la même activité sur le même lieu pendant une durée déterminée, avec ou sans enseigne) sont de fait inapplicables. Quant aux clauses de non-affiliation, elles reposent sur la spécificité du savoir-faire des réseaux, savoir-faire qui, lui-même, a tendance à se banaliser comme l'illustre le secteur des agences immobilières.

Alors, l'avenir est peut-être à l‘abandon de ce type de clause, et  à une liberté plus grande accordée, en fin de contrat, au franchisé. De même d'ailleurs que la jurisprudence est probablement en train de s'orienter vers la reconnaissance du fait que la clientèle appartient totalement au possesseur du point de vente, le franchisé, car cette clientèle est constitutive de son fonds de commerce et de son chiffre d'affaires, dont la propriété ne lui est pas contestée.

Dernier point délicat soulevé  dans ce colloque par Monique Ben Soussen : les clauses d'agrément et de préemption du franchiseur quand le franchisé veut quitter le réseau en fin de contrat. Ces clauses sont, aujourd'hui, d'ordre régalien. Le franchiseur n'est pas tenu de se justifier quand il refuse l'agrément du successeur de son franchisé. Ce qui permet toutes les dérives. Sans contester le droit d'agrément du franchiseur, qui est le corollaire obligé de l'intuitu personae, il faudrait l'encadrer. En le limitant dans le temps, en exigeant que le franchiseur motive ce refus, en l'obligeant soit à préempter, soit à fournir lui-même un successeur à sont franchisé.

Les Actes intégraux de ce colloque seront prochainement disponibles. Ce sera l'occasion de revenir sur ces pistes de réflexion.

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